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Tombeaux, reliques, vitae, liturgie et pèlerinages :
les outils du culte des saints
Ce que nous savons de la mort de Géry provient de la Vita tertia, récit tardif écrit cinq siècles après les événements. Géry, voyant venir sa mort, fait fabriquer un sarcophage de pierre placé dans la crypte de la future église Saint-Géry, alors dédicacée à saint Médard et saint Loup. C’est un 11 août qu’il rend son âme à Dieu.
Commence alors pour lui une seconde existence. À l’évêque succède le saint, dont la mémoire traversera les siècles. Une mémoire qui s’appuie sur le culte qui lui est rendu et qui s’organise en deux lieux différents. Le premier est son tombeau, le second sa chambre dans la résidence épiscopale, attenante à la cathédrale. Au côté de son lit, un autel, des reliques. L’historien Michel Rouche analyse cette situation comme une concurrence entre deux lieux différents, la cathédrale et la basilique. Bertoald, l’évêque successeur de Géry, voulant réorienter vers la cathédrale une partie des dons des fidèles qui venaient prier sur le tombeau du saint.
Les vitae ne sont pas les seuls ouvrages qui permettent de suivre la mémoire d’un saint, qui trouve également place dans les livres liturgiques. Le plus ancien parvenu jusqu’à nous, un psautier des moines de Notre-Dame de Soissons, daté de la fin du VIIIe siècle, mentionne « S.Gaugerici : nomina confessorum ». Certains de ces livres contiennent des calendriers liturgiques avec, pour chaque jour, le nom des saints martyrs ou confesseurs, des lieux et dates de leur mort ou de leur inhumation. Saint Géry y trouvera place à partir du IXe siècle. Le plus connu d’entre eux, Le Martyrologe hiéronymien, comptait environ 6 000 noms de saints, dont celui de Géry ainsi mentionné : « In Cameraco natale sancti Gaugerici confessoris - à Cambrai, l’anniversaire de saint Géry, le confesseur ».
En dépouillant ces livres et calendriers liturgiques, on peut établir une carte géographique de la mémoire de saint Géry, carte qui recoupe en partie celle des églises portant son nom.
Si quelques mentions nous emmènent au loin à Paris, Chartres, Bruges, Utrecht et Cologne, l’espace de Géry est régional, s’étendant sur le nord de la Gaule : à Cambrai, Anchin, Arras, Beauvais, Hasnon, Liessies, Lille, Marchiennes, Maubeuge, Reims, Saint-Amand, Saint-Ghislain, Saint-Quentin, Saint-Omer, Soissons, Tournai.
Le tombeau de Géry disparaîtra à la Révolution française. Il n’en reste que deux des quatre lions qui soutenaient le sarcophage.
Dans son premier lieu, l’église Saint-Géry-du-Mont-des-Bœufs, dans l’actuel jardin public, le tombeau se situait dans une crypte en forme de croix, située sous le chœur et accessible depuis le déambulatoire par deux escaliers. Une fenêtre grillagée permettait d’accéder au tombeau sans avoir à descendre dans l’église inférieure. La vita tertia mentionne les fidèles nombreux venant en processions sur le tombeau du saint et y laissant de nombreux dons, depuis les plus modestes, jusqu’à des trésors de pierres précieuses, d’or ou de terres.
Pourquoi ces pèlerinages ? Parce que Géry est un saint intercesseur et thaumaturge. De son vivant, on lui attribuait miracles et guérisons, cela continue post-mortem. La vita prima indiquait : « les aveugles recouvrent la vue, les sourds entendent, les paralytiques marchent, les “énerguménes” et les “lunatiques” redeviennent sains d’esprit. » Si on veut savoir plus sur le combat contre toutes sortes de maladies, qui est un aspect majeur du rayonnement de Saint Géry, on se reportera aux articles passionnants de Madame Christine Duthoit dans la revue « Cambrésis Terre d’histoire ».